Chez les bembe, il existe un concept Esale, qui exprime mieux l’esprit dans lequel nous devons bâtir notre Pays et notre continent. Esale, tout comme beaucoup de concepts Africains, est très difficile à traduire. Une illustration permet cependant d’en clarifier le sens : dans le village, les villageois n’ont pas à faire eux seuls leurs briques pour bâtir des maisons ou aller cultiver leurs champs. S’il veut aller cultiver ou même récolter par exemple, le propriétaire de champ passe dans le quartier pour sensibiliser et demander de l’aide aux autres membres du village.
C’est alors que toute la communauté ou du moins ceux qui peuvent se libérer vont passer une journée ou deux dans le champ de celui-ci, en train de l’aider. Même chose pour ce qui est de fabrication des briques. Les gens s’engageaient à donner leur temps et leur force physique pour aider l’autre. Le seul paiement c’était simplement que le propriétaire garantisse la nourriture pour le groupe (du riz au haricot ou foufou au Haricot suffisait assez souvent), et savoir (implicitement) que la communauté se mobiliserait tout autant quand mon tour viendra de solliciter son aide.
Dans cet esprit, des maisons ont été bâties, des champs cultivés à des échelles qu’une seule personne n’aurait probablement pas pu à lui seul faire, ceci avec comme corollaires, la cohésion sociale plus renforcée et la vie communautaire plus enrichie.
Le concept d’Esale est plus proche et plus similaire de celui d’Harambee des gens du Kenya et les deux sont le reflet de la vision du monde fondamentalement africaine non pas celle qui affirme que je pense donc je suis, mais bien merveilleusement, vous êtes donc Je suis. Pour l’Africain je ne suis pas une entité autonome à la recherche perpétuelle d’indépendance et de liberté mais une entité en constante recherche de l’autre pour retrouver le soi. L’Africain ne croit et ne conçoit pas la réussite et l’épanouissement en dehors de la communauté, pour lui, en dehors de la communauté il n’y a tout simplement pas de vie.
Et même le leadership et le système de Gouvernance était communautaire. Chez ce même peuple Bembe par Exemple, bien qu’ayant un chef du village, les décisions se prenaient dans le LUBUNGA (CONSEIL) où, en plus de servir d’organe décisionnel était aussi un cadre privilégié d’initiation et transmission de tout l’héritage culturel et historico-sociologique.
L’esprit d’Esale n’était pas seulement le reflet de la vie communautaire mais bien plus la garantie de la sécurité, de la survie et perpétuité de la communauté, c’est dans l’esprit d’esale qu’on pouvait faire face à la guerre et aux Invasions, faire face à la souffrance, s’unir dans le destin, nourrir les rêves et espoirs pour le lendemain et trouver la raison d’être à la fois entant que peuple et individu.
Si nous voulons bâtir un Congo plus fort au cœur de l’Afrique et si nous voulons bâtir une Afrique forte et compétitive sur la scène internationale, nous devons redécouvrir l’esprit d’Esalé, nous devons redécouvrir notre solidarité et le sens communautaire. Dire que l’union fait la force relève du bon sens mais nous ne devons pas seulement nous contenter de savoir que c’est du bon sens nous devons en faire une pratique commune. En faire une partie intégrante de notre être.
Le seul moment dans l’histoire de l’humanité où les divins ont eu peur des humains c’est quand les hommes ont choisi de bâtir dans l’esprit d’Esalé. Dans Genèse 11, les hommes décident de venir ensemble, faire les briques et bâtir une tour dont le sommet attendrait le ciel, parce qu’ils œuvraient dans l’esprit d’Esalé, Dieu dit, voici, ils forment un seul peuple et ont tous une même langue… Maintenant rien ne les empêcherait de faire tout ce qu’ils auraient projeté.
Le Congo et l’Afrique s’ils veulent faire peur à tout le monde, doivent dès maintenant commencer à bâtir dans l’esprit d’Esalé.
Jean Consolateur
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